Coupe d'Afrique: "Le Ghana, le Sénégal, l'Algérie sont les favoris"

Published on: 12 January 2017
Les Algériens Riyad Mahrez (à g.) et Safir Taider, lors d'un match contre l'Ethiopie à Blida, le 15 novembre 2014.
Les Algériens Riyad Mahrez (à g.) et Safir Taider, lors d'un match contre l'Ethiopie à Blida, le 15 novembre 2014. REUTERS/Louafi Larbi

FOOTBALL. L'ancien gardien international du Cameroun, Joseph-Antoine Bell, 62 ans, suit la compétition organisée par le Gabon en tant que consultant pour RFI. A l'aube du premier match, ce samedi, il peine à dégager une hiéarchie.

A 62 ans, Joseph-Antoine Bell renfilerait bien ses gants pour disputer une nouvelle Coupe d'Afrique des Nations (CAN). Mais c'est dans le costume de consultant pour RFI qu'il suivra l'édition 2017, à partir de ce samedi au Gabon. Double vainqueur de l'épreuve sous les couleurs du Cameroun (1984 et 1988), l'ex-gardien de l'Olympique de Marseille ou Saint-Etienne s'attend à une compétition très ouverte, où certaines équipes pourraient surprendre. En tant qu'opposant historique à la fédération camerounaise, il n'épargne pas non plus les dirigeants de sa sélection, coupables selon lui d'un management défaillant.

Dans un pays (le Gabon) secoué par des remous politiques, il y a quelques mois, à quelle CAN vous attendez-vous?

Joseph-Antoine Bell: L'équipe nationale gabonaise n'a pas d'autre pouvoir que celui de l'équipe nationale gabonaise. Donc je ne vois pas pourquoi, certains joueurs ne voudraient pas jouer. L'organisation du tournoi a été attribuée bien avant l'élection (Ali Bongo a été réélu avec 50,66% des suffrages). La contestation née du résultat de l'élection ne devrait pas empêcher la compétition de se tenir. C'est comme si aujourd'hui un opposant au pouvoir disait aux médecins des hôpitaux de ne pas soigner les Gabonais. La CAN aura lieu pour le bien de tous. Quel que soit le pouvoir, ils ont le devoir de faire en sorte que les Gabonais soient contents.

Quel est le favori de cette CAN?

Je ne suis pas sûr qu'il y en ait vraiment. Il y a les supposés grands favoris, le Ghana, le Sénégal, l'Algérie par exemple, mais ils n'ont pas rassuré sur leurs dernières sorties. A mon avis, l'Afrique n'a jamais été aussi fidèle à elle-même. Ceux sur qui on aurait pu compter n'assument pas leur statut de leader.

Il y a une équipe forte au Sénégal, mais malheureusement, le Sénégal a commencé ses éliminatoires de la Coupe du monde de manière un peu hésitante. Il faudra voir comment le Sénégal a digéré ses contre-performances. L'Algérie aussi. Depuis la Coupe du monde 2014, elle s'est mise dans la peau d'un grand d'Afrique et même d'un futur outsider mondial. Mais elle peine à confirmer. Finalement, de tous ces malades, il faudra bien sortir un vainqueur.

Quelle peut-être l'équipe surprise de la compétition comme l'a été l'Islande à l'Euro?

Des équipes qui se sont qualifiées de façon surprenante, comme le Zimbabwe, l'Ouganda, la Guinée-Bissau. Maintenant, il faudra attendre pour voir si ces qualifiés surprises seront les équipes rafraîchissantes de la compétition. Au départ, ce sont les quatrièmes de leur groupe. Mais leurs adversaires peuvent s'attendre à avoir des matchs particulièrement difficiles.

Vous ne citez pas votre pays, le Cameroun, est-ce volontaire?

Oui, elle fait partie des sélections les plus malades. On a vu comment s'est passée la Coupe du monde 2014. Et maintenant les éliminatoires pour 2018. On a cru à un moment que le Cameroun vivait un nouveau départ. Mais cette équipe a montré qu'elle n'était pas ce qu'on croyait.

Huit joueurs camerounais (Amadou, Anguissa, Choupo-Moting, Matip, Ndy Assembe, Nyom, et Poundjé) ont décliné la sélection sans être blessé. Le comprenez-vous?

Je le comprends tellement bien que du temps où je jouais les problèmes étaient les mêmes. On présente ces joueurs comme n'étant pas patriotes. Mais personne ne songera à remettre en cause le management de l'équipe.

Souvenez-vous lorsque Etame Lauren n'est plus venu en équipe nationale pour cause de management défectueux (en 2002). A l'époque, un membre du staff avait détourné des primes. On avait préféré ne plus appeler Lauren et garder le membre voleur. On ne se souvient plus de la façon dont il a quitté l'équipe nationale, en pleine force de l'âge, avec du talent. Il jouait à Arsenal! Plus tard, Joseph-Désiré Job s'est plaint, on a préféré ne plus l'appeler. Samuel Eto'o s'est plaint du désordre aussi. Voilà pourquoi il y a des défections.

Vous n'êtes donc pas du tout d'accord avec Patrick M'Boma, un autre ancien Lion, qui prône la radiation à vie pour ces joueurs... 

Non, il raconte une connerie. Quand vous avez un joueur qui ne vient pas, vous pouvez réagir de manière épidermique comme ça. Là, vous avez huit joueurs. Je me souviens d'un incident lors d'une causerie en 1994. Tous les joueurs étaient arrivés en retard. Le sélectionneur n'a pas dit: 'Je vais vous enfumer, vous êtes en retard!" Il a dit: 'Si vous arrivez tous en retard en même temps, dites-nous ce qu'il se passe.' Il avait raison, il se passait quelque chose.

Si vous avez huit joueurs qui déclinent la sélection, si vous ne vous posez pas de question sur votre management, vous n'y arriverez jamais. Ce que dit Patrick M'Boma prouve qu'il est footballeur, mais pas manager.

Vous en voulez donc au sélectionneur Hugo Broos?

Je lui en veux d'être faible. Je vous donne un exemple. Il a convoqué 25 joueurs le 2 janvier pour donner sa liste définitive le 4. Il a cédé à une demande de sa fédération qui n'est pas au niveau.

Le gardien Andre Onana, ne sera pas là. Il aurait été l'un des rares gardiens africains titulaires dans un grand club européen (l'Ajax Amsterdam). Comment l'expliquez-vous?

Ce n'est pas d'aujourd'hui. Quand j'arrivais en France (en 1985), c'était déjà le cas. Cela s'explique par le fait que c'est un poste très particulier. Unique. Vous n'êtes pas polyvalent comme un attaquant par exemple. Quand on prend un attaquant, vous pouvez jouer devant, à deux, sur le côté. Il y a plusieurs possibilités. Pas pour un gardien. Pour être titulaire, il faut apporter des garanties. Il est plus facile pour les clubs de recruter des joueurs de champs africains que des gardiens de but.

En Afrique, quand on joue dans la rue, on joue plus souvent dans le champ que comme gardien de but. Tomber sur un terrain en terre battue, tous les jours, n'est pas évident. Quand on est dans une école de formation, le poste de gardien de but n'est pas forcément bien pris en charge. Et puis il y a un problème de talent à la base.

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